Pierre-Jean Desfossé

« Pour moi, le patrimoine, c’est la génétique de la civilisation. C’est l’héritage de faits, de découvertes, d’us et coutumes, d’art, d’architecture, d’inventions, de techniques. Cet héritage nous permet de comprendre d’où nous venons et nous en sommes aujourd’hui. Il est nécessaire de garder en mémoire ce chemin parcouru qui explique comment nous évoluons ou pouvons évoluer. De cette mémoire nous pouvons en garder les bienfaits mais aussi analyser les erreurs, afin d’éviter de les reproduire et de s’améliorer. »

Après avoir passé une bonne partie de sa vie professionnelle dans le secteur informatique, PierreJean Desfossé a mis son énergie et sa motivation au service du projet muséal de la conserverie Alexis Le Gall. Il faut dire que ce passionné de voitures de collections, ancien président du club des TeufTeuf et administrateur de la Fédération Française des Véhicules d’Epoque, est entièrement dévoué à la préservation du patrimoine. Après deux ans en tant que bénévole de l’association des Amis de la conserverie Alexis Le Gall, il en devient le président en 2018. Depuis cette élection, il se consacre à faire vivre le projet muséal. Il nous en dit plus dans cette interview

Question 1 : Pouvezvous nous décrire votre parcours professionnel ?

Je suis informaticien de formation. J’ai enseigné à l’IUT de Reims puis chez un constructeur d’ordinateurs et pour deux autres sociétés. J’y ai fait fonction de formateur, d’analyste, d’ingénieur système, technicocommercial, de directeur de projets, de responsable informatique (développement, réseau, etc…). Le dernier emploi que j’ai occupé, c’était dans une société de services en tant que directeur d’un centre de traitement de tri de chèques pour les banques (BNP, Crédit Lyonnais, Société Générale, Banque de France etc.). J’étais à la tête d’une équipe de 100 personnes pour le traitement de 500 000 chèques par jour, 6 jours sur 7 24h/24. Rien à voir à voir avec le poisson et la conserve !

Question 2 : Qu’estce que vous inspire la notion de patrimoine ?

Pour moi, le patrimoine c’est la génétique de la civilisation. C’est l’héritage de faits, de découvertes, d’us et coutumes, d’art, d’architecture, d’inventions, de techniques. Cet héritage nous permet de comprendre d’où nous venons et où nous en sommes aujourd’hui. Il est nécessaire de garder en mémoire ce chemin parcouru qui explique comment nous évoluons ou pouvons évoluer. De cette mémoire nous pouvons en garder les bienfaits mais aussi analyser les erreurs, afin d’éviter de les reproduire et de s’améliorer.

Le patrimoine industriel fait partie de cette mémoire et il faut le préserver. L’architecture des bâtiments, le matériel utilisé, les techniques à travers les âges expliquent toutes les évolutions du travail, les évolutions sociales des travailleurs. Faire comprendre à un jeune qu’avant l’arrivée de l’électricité, on s’éclairait au gaz, que l’on faisait chauffer un fer à souder avec de l’acétylène, ce n’est pas chose facile. Rien de tel qu’un lieu où l’on peut montrer les anciens usages afin qu’il s’en souvienne et comprenne les évolutions.

Je suis sensible à la sauvegarde du patrimoine industriel. Je m’intéresse depuis ma jeunesse au patrimoine automobile et collectionne quelques voitures depuis plus de 40 ans. J’ai longtemps présidé le plus vieux club de collectionneurs français : le club des TeufTeuf, fondé en 1935 par Hyppolite Panhard. Ce sont principalement des voitures de 1891 à 1914 que les collectionneurs ont sauvegardées, réparées, entretenues et qui font rouler ce musée vivant. Pour aller jusqu’au bout de ma démarche de sauvegarde de patrimoine roulant, j’occupe des fonctions d’administrateur de la Fédération Française des Véhicules d’Epoque. Le plus passionnant pour moi, ce n’est pas le dernier modèle construit mais les premières voitures avec leurs défauts, les inventions des ingénieurs pionniers qui ont permis de faire évoluer les véhicules pour arriver aux performances et niveaux de sécurité que nous connaissons aujourd’hui. Rouler dans une voiture du début du siècle, avec tous les aléas que ça comporte, permet de prendre toute la mesure du chemin parcouru.

Question 3 : Pouvezvous nous parler de votre rôle dans le cadre du projet muséal de la conserverie Alexis Le Gall ?

J’ai découvert Loctudy dans le cadre d’un séjour de vacances en 1954. Je suis, par la suite, venu m’installer à Loctudy durant la seconde partie de ma vie. J’ai fait la connaissance de Guy Cosnard, président de l’association des Amis de la Conserverie Alexis Le Gall (ACAL) au travers de son art de graveur. En 2016, le projet du musée naissait à peine. Participer à la création d’un musée de « A à Z » me semblait être un projet passionnant. Guy n’a pas eu de mal à me convaincre de rejoindre l’équipe.

En 2018, Guy Cosnard a émis le souhait de quitter son poste pour créer une autre association, « Arts in Loc », plus proche de ses occupations artistiques. Il m’a alors proposé de le remplacer à son poste de président de l’association ACAL. J’ai accepté de relever ce challenge que je trouvais stimulant. En tant qu’administrateur des Amis du Musée automobile de Compiègne le plus ancien musée automobile de France créé en 1927, je percevais bien les enjeux et le rôle à jouer d’une telle association.

Mon rôle, avec l’aide du conseil d’administration, a été, dans un premier temps, de soutenir et aider l’équipe de la commune sur la création et la mise en place du projet. Nous avons mené pour cela un « chantier des collections ». Avec des membres bénévoles, nous avons réalisé pendant 3 mois l’inventaire, aux normes des Musées de France, de l’ensemble des 800 objets de la collection. Cet inventaire a consisté en un tri, dépoussiérage, numérotation, identification et description, mesures, photographie, conditionnement et rangement des objets.

Dans un second temps, nous avons créé un groupe de travail pour participer à l’élaboration et l’étude des dossiers de muséographie et de scénographie pour soutenir l’équipe de la Mairie sur le projet. En parallèle, nous avons conduit des réunions pour tenir informé le public sur l’évolution du projet, également sur des sujets autour de la pêche et des conserveries en pays bigouden. Nous avons aussi organisé des visites de la conserverie pour les journées du patrimoine.

Nous continuerons ce travail à l’avenir, en restaurant quelques objets de la collection mais aussi en nous organisant pour aider le musée à vivre et évoluer, en apportant des idées, en faisant sa promotion, en le faisant connaitre au public et en enrichissant ses collections. J’aimerais faire de l’association un point de rencontre des amoureux de l’histoire locale, de l’histoire de la pêche et de ses conserveries pour qu’ils puissent approfondir et parfaire leurs connaissances. L’ACAL doit être le lien entre le musée et la population locale et touristique.

Question 4 : Quels sont les grands défis que vous avez eu à relever dans le cadre de ce projet muséal ?

Le plus grand défi que j’ai eu à relever fut ma méconnaissance totale du sujet ! Lorsque j’ai accepté de me présenter au poste de président de l’association des Amis de la Conserverie Alexis Le Gall, j’ai clairement présenté ma position aux membres du conseil d’administration, sur trois points en particulier :

  • Premièrement, je ne voulais prendre la place de personne. Je me présentais pour aider l’association dans son organisation et sa gestion.
  • Deuxièmement, je n’étais pas un enfant du pays. Je ne voulais pas que l’on pense qu’un « Parisien » prenait la place d’un Loctudiste pour expliquer à tous comment il fallait mettre des sardines en boite.
  • Troisièmement, j’étais un néophyte/profane sur les techniques de pêche, la mise en boite et les techniques de mise en conserve. J’avais tout à apprendre sur ces sujets. Ce défi, j’espère l’avoir aujourd’hui relevé, en partie.

Question 5 : Quel est votre plus beau souvenir sur ce projet muséal ?

Il n’y a pas un souvenir plus beau que les autres. C’est un ensemble de richesses qui m’ont été apportées par des rencontres d’hommes et de femmes, que ce soit auprès des bénévoles qui viennent nettoyer les objets de la collection et aider à distribuer des tracts sur le marché ; ou des agents municipaux des différents services de la mairie qui participent au projet. Si je devais souligner des moments qui m’ont marqué, j’en mentionnerais deux en particulier :

  • Les réunions très enrichissantes sur la création du musée, lors de l’étude de la muséographie, de la scénographie avec les professionnels et les bénévoles.
  • Les temps de rencontre et les amitiés qui se sont créées avec des historiens, des férus de la pêche, des experts de la conserve, des gens qui croient en ce projet. Pour conclure, je dirais que ma plus belle récompense sur ce projet, ce sont les sourires sur tous les visages que je croise quand je parle du Musée de la Conserverie Alexis Le Gall.
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